Si vous avez croisé Isabelle de 3e MONDE, elle vous a déjà peut-être parlé de cet outil qu’elle utilise avec ses clients mais aussi dans son organisation personnelle : les Terreaux Culturels®. Cette théorie a été imaginée et développée par André ROBITAILLE, avec qui Isabelle collabore aujourd’hui. Elle est le fruit de plus de 25 années passées à accompagner les démarches d’innovation dans les entreprises.

 

Isabelle, peux-tu nous expliquer rapidement en introduction ce que sont les Terreaux Culturels® ?

Faisons un peu de jardinage… Ce que produit une entreprise peut être vu comme la partie visible d’un arbre : ses méthodes, ses livrables, ses produits, etc. C’est le résultat de son travail. Cet arbre pousse sur un terreau, le terreau culturel, l’ADN de l’entreprise. Ce terreau va conditionner sa façon de s’organiser, de travailler, de communiquer, d’être en relation avec son écosystème (clients, fournisseurs, partenaires, etc.) et même sa vision. La théorie des Terreaux Culturels® apporte un prisme de lecture de la «catégorie» de terreau dans laquelle l’ADN de l’organisation prend racine.

 

Comment as-tu découvert cette théorie ?

C’est l’histoire d’une rencontre avec un homme formidable, André Robitaille. André a constaté que de nombreux projets de transformation ou projets tout court étaient en échec et n’atterrissaient pas là où ils étaient attendus. Il s’est donc posé la question du pourquoi, et surtout pourquoi tel type de projet va marcher dans une entreprise et complètement échouer dans une autre. Qu’est-ce qui fait la différence ?

Aujourd’hui André souhaite transmettre son savoir, cette étude, et j’ai la chance de pouvoir collaborer avec lui sur le sujet. Nous sommes dans une co-construction continue où l’on partage nos analyses.

 

Comment cartographie-t-on l’ADN d’une organisation ?

On peut cartographier la culture de l’entreprise ou l’organisation en fonction de 2 axes : le degré de formalisation et le degré de collaboration.

En fonction de ces axes et du positionnement de l’entreprise, on peut déterminer une culture et donc des modes de fonctionnement et des façons de travailler qui lui sont propres.

Qu’est-ce qu’on cartographie ? Une équipe ? Une entreprise ? Des personnes ?

Cela dépend des objectifs, de ce que l’on souhaite faire, par rapport à un sujet donné, avec des objectifs donnés. Au sein d’une même entreprise, il peut y avoir des zones de culture différentes. Un exemple très souvent cité est celui d’une entreprise internationale où les cultures des pays vont fortement imprégner la culture d’entreprise et où les modes de fonctionnement vont de ce fait être différents d’un secteur à l’autre.

L’outil d’analyse qu’est la carte des Terreaux Culturels® va permettre, par exemple, de comprendre pourquoi un service n’arrive pas du tout à travailler avec un autre, et de trouver comment les faire s’entendre, où mettre les efforts.

C’est donc intéressant d’avoir cette cartographie à différents niveaux : à la direction, à l’équipe…

On peut même l’avoir par projet, où on va cartographier les parties prenantes pour déterminer les meilleures façons de travailler ensemble. Cela donne un prisme de lecture sur les modes de fonctionnement, les modes d’action et les modes de communication. Et également sur ce qui est attendu par chacune de ces parties prenantes.

Pour l’individu, l’analyse peut permettre de comprendre des inadéquations constatées entre lui et son environnement ou son projet. Mais il faut faire très attention. Au niveau individu, il n’y a pas de bon ou de mauvais résultat. Il n’y a aucun jugement de valeur, il n’y a pas une case qui soit meilleure que l’autre. Il s’agit juste de trouver quelle est la meilleure place pour chacun pour que tout le monde se sente bien.

Il faut garder en tête que chaque entreprise a sa cible, en fonction de ses objectifs, de son écosystème…

Si je suis dans une entreprise libérée, est-ce que je peux utiliser la carte des Terreaux Culturels® quand même ?

Bien sûr, l’outil d’analyse est utilisable en toutes circonstances, quel que soit le type d’organisation. Généralement, les entreprises libérées, ou les organisations dites Opales (cf. Reinventing Organizations de F.Laloux) ont un niveau de formalisme bas pour un niveau de collaboration élevé, donc un terreau culturel dit Agile. L’intérêt de l’analyse réside dans l’évaluation de l’état des lieux et du chemin à parcourir pour tendre vers, par exemple, une entreprise plus agile (et donc un terreau culturel agile).

Est-ce que tu as des exemples d’utilisation de cette carte des Terreaux Culturels® ?

Dans le monde bancaire ou des assurances, le formalisme est généralement élevé et le niveau de collaboration assez moyen. Le terreau est alors de type »Réglement », terreau cohérent avec l’activité et qui convient aux contraintes surtout réglementaires de ce secteur.

Mais le monde extérieur évolue, et bouge énormément. Pour faire face aux défis qui sont en train d’arriver, ils vont devoir aller vers davantage de collaboration pour davantage de réactivité, et trouver leurs propres modes d’organisation. C’est là que nous intervenons.

Pourquoi l’utilisation de cette théorie est intéressante dans le cadre de tes interventions chez 3e MONDE ?

Quand on dit que les modes de travail et d’interactions sont différents selon la culture d’entreprise, cela reste très abstrait. Les Terreaux Culturels® permettent de factualiser cette réalité, de la rendre pragmatique et permet une meilleure compréhension. Cette théorie permet de justifier l’utilisation de certains chemins d’intervention, c’est pourquoi nous l’utilisons dans les projets de transformation que nous menons dans les entreprises que nous accompagnons. 

 

Crédits Photo : Markus Spiske